Gerard Viale Auteur

Gerard Viale Auteur

La quotidienne de Laurent Joffrin

La lettre politique de Laurent Joffrin

 

 

La tempête nationaliste

 

Le vent, décidément, souffle toujours aussi fort. A la fin des années 70, la politique mondiale a été bouleversée par un puissant cyclone libéral, symbolisé par la double élection de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan, qui allait ouvrir le cycle de la mondialisation sans frein. Nous vivons un ouragan du même ordre, en sens contraire, au profit des nationalistes de tous les pays.

En Inde, première démocratie du monde, les commentateurs tablaient, dans l’élection d’aujourd’hui, sur une bonne tenue du parti du Congrès, qui devait mettre en difficulté le Premier ministre sortant Narendra Modi. C’est une deuxième victoire écrasante qui se dessine en faveur de son parti, le très nationaliste BJP.

Quelques jours plus tôt, Rodrigo Duterte, le national-populiste sécuritaire qui gouverne les Philippines à la schlague, avait consolidé son emprise électorale en conquérant le Sénat, seule institution encore épargnée par cette vague autoritaire.

Auparavant, Benyamin Nétanyahou, qu’on disait malmené par les affaires et par l’émergence d’un rival crédible, Benny Gantz, remportait haut la main des élections israéliennes pour un cinquième mandat, en usant d’une rhétorique tout aussi nationaliste. Quelques mois plus tôt, le militaire Jair Bolsonaro, inconnu jusque-là, était élu à la tête du Brésil, premier pays d’Amérique latine.

Aux Etats-Unis, en dépit de son incompétence notoire, de ses mensonges répétés, des affaires qui conduisent les démocrates à envisager son «impeachment», Donald Trump conserve l’appui de sa base et garde toutes ses chances d’être réélu dans deux ans, porté par une conjoncture économique très favorable. Trois autres grands pays, la Russie, la Chine et la Turquie, sont gouvernés par des régimes qui jouent sans retenue sur la fibre nationaliste pour rester en place.

En Grande-Bretagne, le parti du «brexiter» Nigel Farage, créé il y a quelques semaines, a bouleversé en une campagne l’échiquier politique. Il est largement en tête des pronostics pour les élections européennes, aspirant les voix des anti-européens jusque-là rattachés aux partis traditionnels, travailliste ou conservateur. La Première ministre, Theresa May, a déjà été emportée par la tempête et il est désormais vraisemblable que l’excentrique Boris Johnson, brexiter dur, lui succède au 10 Downing Street.

Dans l’Union européenne, les nationalistes Orban, Salvini et le PIS polonais sont solidement installés au pouvoir. L’élection de dimanche verra probablement une poussée spectaculaire des partis antieuropéens, qui devraient doubler leurs voix et remporter un tiers des sièges au Parlement. L’Union résiste : les deux tiers des électeurs apporteront leurs voix à des partis pro-européens Mais la vague monte. Last but not least, en France, où Emmanuel Macron s’est présenté comme le rempart contre les nationalismes, son parti LREM risque fort d’être devancé d’une courte tête par le Rassemblement national de Marine Le Pen, qui redeviendrait, à la faveur du scrutin, le premier parti du pays.

Que faire ? Il faudrait une lettre beaucoup plus longue pour commencer à répondre, sans apporter pour autant la solution. Mais un point central doit faire réfléchir. Dans pratiquement tous ces pays, c’est la colère d’une partie des classes populaires autochtones contre les effets de la mondialisation libérale qui a déclenché ces bouleversements. Un sujet de méditation pour les progressistes et les démocrates de tous les partis.

LAURENT JOFFRIN

 

 



24/05/2019
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