Gerard Viale Auteur

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La quotidienne de Laurent Joffrin

 

La lettre politique de Laurent Joffrin

 

Griveaux et les «abrutis»

 

Benjamin Griveaux s’est platement excusé auprès de la mère d’Hugues Renson, élu d’En Marche un temps aspirant maire de Paris. Il était temps : cet été, commentant en privé la floraison de candidatures En Marche pour la mairie de Paris, il avait qualifié aimablement ce Renson de «fils de p…»,ce qui lui avait permis d’insulter deux personnes en une seule formule, rapportée ensuite par le Point. Rencontrant la supposée «p…» en question il y a quelques jours, il lui a dit sous forme de boutade : «J’ai eu des propos peu amènes à votre égard, madame, mais c’était parce que je ne vous avais pas rencontrée.» Le geste est méritoire, mais l’explication étrange. Si l’on prend cette amende honorable au pied de la lettre, il en ressort que Griveaux a tendance à tenir les femmes qu’il ne connaît pas pour des «p…»,ce qui élargit nettement le cercle de ses détestations potentielles. On pense à ce vieux proverbe à la fois machiste et méditerranéen (dit-on) : «Toutes les femmes sont des p…, sauf ma mère qui est une sainte.»Comme quoi, le nouveau monde souffre parfois des réminiscences de l’ancien.

On n’ose imaginer, du coup, ce que Benjamin Griveaux pense de la mère de Cédric Villani, lequel envisage très sérieusement de se présenter à l’élection parisienne tout en se réclamant lui aussi de la République en marche, ce qui pourrait obérer les chances du candidat officiel. On sait en revanche ce qu’il pense du fils de cette innocente mère de famille. Villani n’a, selon lui, «pas les épaules» pour ce genre de campagne. Il concède toutefois que son concurrent «est plus intelligent que les autres», ce qui est un demi-compliment, puisque Griveaux tient ceux qui guignaient la mairie de Paris au sein d’En Marche pour une bande «d’abrutis». Villani est ainsi un «abruti» plus «intelligent» que les autres «abrutis». L’intéressé pourrait en être blessé s’il n’avait pas reçu la médaille Fields, l’équivalent du prix Nobel en mathématiques, ce qui atteste, en principe, d’une certaine agilité intellectuelle.

Cette compétition fratricide va en tout cas pimenter la course à l’hôtel de ville parisien. Villani semble décidé à aller jusqu’au bout. Deux signes ne trompent pas : il a changé de coupe de cheveux, passant du style Musset à celui du pubard moyen ; il a abandonné la lavallière et le bijou en forme d’araignée qu’il portait entre ces deux épaules qu’il n’a pas (selon Griveaux) et qui en faisaient un personnage reconnaissable par son excentricité assumée. Paris vaut bien une araignée.

Villani est un faux farfelu qui prépare sa candidature aussi méthodiquement qu’il a conduit sa carrière de mathématicien. Il confesse même en privé, dit-on, qu’il vise à terme l’Elysée. Pour cette première étape, il a réuni un brillant comité de soutien et les sondages lui prédisent une bonne prestation dans le scrutin. Mais il pourrait aussi faire les affaires d’Anne Hidalgo en divisant les voix d’En Marche, assurant ainsi la réélection de la socialiste. Si tel était le cas, on devine ce qu’Emmanuel Macron pourrait dire à son tour – et en privé – des candidats En Marche à Paris, Griveaux compris : «une bande d’abrutis».

 

LAURENT JOFFRIN

 



04/09/2019
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