Gerard Viale Auteur

Gerard Viale Auteur

La quotidienne de Laurent Joffrin

La lettre politique de Laurent Joffrin

 

 

La droite lilliputienne

 

Le parti LR s’apprête à désigner un chef de file qui prendra la suite de Laurent Wauquiez, reparti en Auvergne pour cause de débâcle aux européennes. Le beau pays des volcans éteints est un cadre idoine de méditation pour ce leader éruptif.

Sage – ou pusillanime –, la direction de LR a fixé un critère dirimant pour les impétrants : ils ne doivent nourrir aucune ambition présidentielle, de manière à éviter tout retour de la guerre des chefs. Il faut donc un homme ou une femme qui ne fasse d’ombre à personne. Les mauvaises langues rappelleront la citation prêtée à Clemenceau à propos de l’élection présidentielle sous la IIIe. Là aussi, il s’agissait d’élire un roi soliveau pour laisser au président du Conseil, issu de la Chambre, toute latitude pour gouverner. «Je vote pour le plus con», aurait dit le Tigre, grand défenseur du pouvoir du Parlement. Dans ces conditions, la compétition au sein de LR est très ouverte… C’est Christian Jacob qui tient la corde. Le grognard chiraquien, président du groupe à l’Assemblée, a déclaré son intérêt pour le poste. «Je serai le plus petit dénominateur commun», a-t-il dit, rassurant à souhait, ce qui tend à prouver qu’il n’est pas si bête. Dans cette droite lilliputienne, il ne se prend pas pour Gulliver, ce qui est un bon point.

Il s’apprête à pénétrer dans un champ de mines. Deux leaders «naturels» (du moins le pensent-ils) se sont mis en dehors du parti et en embuscade : Xavier Bertrand et Valérie Pécresse. Deux chevau-légers, Retailleau et Leonetti, se tiennent sur la réserve, tout comme François Baroin, l’enfant à la voix d’or. L’ombre de Sarkozy pèse toujours sur la droite, même si l’ancien président a plus à faire avec les juges qu’avec les élus. La direction de LR est largement noyautée par la jeune garde wauquieziste qui n’a renoncé à rien. Il faudra donc toute la matoiserie de celui qui se présente comme un «paysan en politique» (titre d’un livre par lui publié) pour lui éviter de sauter prématurément.

Il devra encore, lui qui n’est guère idéologue, gérer un débat idéologique embrouillé. Wauquiez avait à dessein droitisé son discours pour plaire aux militants et, surtout, pour colmater les fuites d’électeurs attirés par le lepénisme. Mais cette ligne identitaire et agressive a provoqué la désertion d’une grande partie de la bourgeoisie, rassurée par Emmanuel Macron, sans entamer le bloc RN. Ce qui ne refroidit pas les ardeurs des réacs de LR, qui ont adopté un proverbe bien connu des idéologues : si notre médication a aggravé le mal, c’est parce qu’on n’en a pas pris assez.

Lire aussi Georges Pompidou : à droite, la nostalgie pour programme

Jacob, s’il est désigné, sera plus prudent. Mais l’autre voie est tout aussi obstruée : un LR ouvert, libéral, européen, plus centriste, se heurtera de front au macronisme version Philippe, Le Maire et Darmanin, qui lui a largement coupé l’herbe sous le pied. Jacob devra installer son noble séant entre deux chaises, ce qui n’est pas confortable.

Au total, la gauche est éparpillée, la droite jivarisée. Peau de léopard d’un côté, peau de chagrin de l’autre. Plus que jamais le couple Macron-Le Pen domine la vie politique. Il faudra bien trouver le moyen d’en sortir un jour.

LAURENT JOFFRIN

 

 



21/06/2019
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Littérature & Poésie pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 7 autres membres