Gerard Viale Auteur

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La lettre politique de Laurent Joffrin

 

 

Le Pen-Medef, le flirt interrompu

 

Marion Maréchal nous voilà… Et puis finalement non. Le torride tango du Medef avec Marion Maréchal-Le Pen, un faux pas en avant, deux pas en arrière, se termine sur un couac. Tout bien réfléchi, le débat sur le populisme que l’organisation patronale avait projeté d’organiser avec la nièce de Marine Le Pen est remplacé, comme on dit dans la marine, par deux coups de sifflet brefs.

Pour donner à cette reculade un air de symétrie, on désinvite aussi les intervenants issus de la France insoumise, comme si ces deux extrêmes étaient identiques. En fait, on l’a bien compris : c’est la protestation contre la venue de Marion Maréchal à l’université du Medef qui explique ce revirement.

Aussitôt le Rassemblement national se récrie : sectarisme, ostracisme, censure de la bien-pensance. Eux qui prônent la discrimination envers les immigrés et leurs enfants, ne supportent pas d’être à leur tour traités en étrangers. Pourtant le fait est là : les lepénistes ont beau montrer patte blanche, ils ne forment pas un parti comme les autres. Préjugé ? Injustice ? C’est là qu’il faut rappeler les bases de ce traitement à part. Si le RN est toujours mis à l’écart de la normalité républicaine, c’est qu’il s’est lui-même mis en retrait de la République. Il n’est certes pas fasciste, il respecte les lois, condamne la violence, joue le jeu des élections libres. Mais il n’est pas pour autant républicain.

Ainsi Marion Maréchal : trois exemples. Cette jeune femme au physique angélique n’a rien d’un ange démocratique. Elle le dit elle-même : «Je suis un peu saoulée des valeurs républicaines qu’on invoque à tout bout de champ.» On ne saurait être plus clair. Elle se situe, dit-elle encore, au confluent des droites légitimiste et bonapartiste. Deux courants historiquement antirépublicains, qui prônaient, l’un la monarchie, l’autre l’Empire. Elle professe son admiration pour Napoléon, chose banale, mais c’est le Napoléon exalté par Bainville et Barrès, deux pères fondateurs de l’ancienne Action française de Maurras, ennemi revendiqué de «La Gueuse». Elle croit au «grand remplacement» des Français par des éléments étrangers, musulmans pour l’essentiel. Il ne s’agit pas seulement d’une thèse démographique (fausse au demeurant). Mais d’une menace qu’elle agite pour justifier des mesures d’urgence contre les «envahisseurs» : la suppression du «droit du sol», par exemple, qui fait d’un enfant d’étranger installé en France un Français comme les autres, au profit du seul «droit du sang» qui renvoie à une conception étroitement ethnique de la nation, parfaitement contraire à la tradition républicaine.

La jeune Marion estime encore qu’on ne saurait conférer à l’islam une place égale au catholicisme dans ce pays qu’elle voit toujours comme la fille aînée de l’Eglise, autre conception contraire à la tradition républicaine. Elle définit la laïcité comme un instrument utile pour lutter contre l’islam, mais qui se change en «laïcisme» dès qu’elle renvoie la religion chrétienne à la vie privée. Au nom de cette prééminence religieuse, elle condamne le mariage pour tous et la PMA, position là encore contraire à l’esprit républicain, par définition égalitaire.

Bref Marion Maréchal-Le Pen fait passer sa conception de l’identité avant les valeurs universelles, comme l’ont fait avant elle tous les ennemis de la République. Voilà pourquoi elle ne saurait être tenue comme une femme politique comme une autre, ni comme une intervenante légitime en toutes circonstances. Le Medef a mis un certain temps à s’en rendre compte. Mieux vaut tard que jamais.

LAURENT JOFFRIN

 

 



05/07/2019
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