Les éthiques de la nature, apparues dans les années 1970, se sont essentiellement centrées sur la nature sauvage ou la notion de wilderness [1]. Pour ces philosophies de l’environnement, il s’agissait de protéger une nature belle et remarquable aussi bien contre les avancées de la ville que contre les activités agricoles qui tendaient à la dégrader. La protection de l’environnement a alors pris la forme de la sanctuarisation d’espaces naturels à l’écart de l’activité des hommes : là où les terres sont habitées ou transformées par les hommes, il faut renoncer à penser la nature.
Or, faut-il que la nature soit intacte pour se voir reconnaître une valeur ? Si les espaces de nature vierge sont impossibles à trouver, devons-nous pour autant conclure que la nature n’existe plus ? Ce sont les questions que pose le philosophe Rémi Beau dans son ouvrage, Éthique de la nature ordinaire. Recherches philosophiques dans les champs, les friches et les jardins. Contre l’idée selon laquelle la nature résiderait seulement dans des lieux remarquables, l’ouvrage nous invite à explorer une « nature ordinaire », celle « avec laquelle nous vivons au quotidien, une nature proche de nous, mais bien souvent invisible » (p. 22), et que l’auteur s’attache à rendre apparente en menant une investigation théorique et empirique riche et rigoureuse.
https://laviedesidees.fr/Penser-avec-les-mauvaises-herbes.html
Rémi Beau, Éthique de la nature ordinaire. Recherches philosophiques dans les champs, les friches et les jardins, Publications de la Sorbonne, 2017, 342 p., 24€.