Gerard Viale Auteur

Gerard Viale Auteur

La Lettre quotidienne de Laurent Joffrin

 

La lettre politique de Laurent Joffrin

 

Le pudding du Brexit

L’invraisemblable charivari du Brexit continue dans une Grande-Bretagne qui veut sortir de l’Union sans en sortir vraiment mais tout en n’y restant pas. Mélasse, pudding et marshmallow. La Première ministre, Theresa May, essaie de faire adopter aux Communes l’accord qu’elle avait conclu avec l’Union européenne, plus ou moins retouché au cours de ses dernières discussions avec les représentants de l’UE (plutôt moins que plus). Vote difficile : le même accord a été sèchement recalé il y a quelques semaines par la coalition de ceux qui le trouvent trop dur et de ceux qui le trouvent trop mou. Si elle échoue, elle fera voter le lendemain sur l’hypothèse d’une sortie sans accord (hard Brexit), dont la majorité des députés, en principe, ne veut pas non plus. S’ils refusent, Londres demandera un report, mais l’UE ne veut en aucun repousser la décision aux calendes anglaises. Perplexité, confusion et incertitude.

L’affaire démontre une nouvelle fois, s’il en était besoin, l’incroyable démagogie dont ont fait preuve dans cette affaire les «brexiters», qui n’ont rien anticipé de tout cela, et avec eux les souverainistes qui caressent l’idée de démantibuler la construction européenne. Après avoir voté sur la foi de promesses fallacieuses, les Britanniques s’aperçoivent qu’ils ont plongé leur pays dans le marasme politique pour deux ou trois ans, que l’économie se porte plutôt plus mal et que la sortie de l’Union leur cause plus de problèmes qu’elle n’en résout.

Au fil du temps, les économies européennes se sont étroitement entremêlées. Sortir, c’est instaurer de nouvelles barrières douanières entre l’île et le continent. Difficile sur le plan technique, l’opération, au mieux, ne changera pas grand-chose, sinon un renchérissement du prix des produits pour les consommateurs britanniques et une plus grande difficulté à exporter vers l’Europe, avec laquelle, de toute manière, la Grande-Bretagne commerce et commercera en priorité. C’est la raison pour laquelle l’accord négocié comprend le maintien d’une grande ouverture entre les deux marchés : aux termes du texte, la Grande-Bretagne continuera d’appliquer les normes européennes, mais elle n’aura plus aucun pouvoir au sein de l’Union pour les modifier. C’est ce qui s’appelle «reprendre le contrôle».

Il lui faudra aussi et surtout régler la question de la frontière irlandaise. Si on la laisse ouverte, l’UE laissera un trou béant dans son dispositif de contrôle des produits, pourtant indispensable pour assurer le respect des normes sanitaires ou environnementales. Si on la ferme, on court le risque de rallumer le conflit entre unionistes pro-anglais et partisans de l’unification de l’Irlande, qui a ensanglanté la vie du Royaume-Uni pendant des décennies et s’était apaisé justement par l’effacement de ladite frontière.

Contrairement à la fable répandue par les nationalistes, l’Union ne souhaite en rien empêcher le Brexit. Et donc cette idée selon laquelle Bruxelles exercerait une sorte de dictature sur les Etats membres est un grossier mensonge. L’Union a approuvé à l’unanimité l’accord de sortie négocié par Madame May. Il suffit à Londres de le ratifier pour sortir. Aucune pression là-dessous. Ce n’est pas l’Europe qui a grippé la machine, c’est le Parlement de Westminster, qui ne sait pas ce qu’il veut. Parce qu’il se rend compte, dans sa majorité, que l’Union est un cadre souple et utile, mais qu’il doit appliquer une décision fruste prise sans en mesurer les conséquences.

 

 

 



13/03/2019
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