Gerard Viale Auteur

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La quotidienne de Laurent Joffrin

 

La lettre politique de Laurent Joffrin

 

L'arroseur populiste arrosé

C’est entendu, les nationaux-populistes ont le vent en poupe depuis une décennie, portés par le désarroi des classes populaires. Pourtant une vérité émerge depuis quelques mois qui finira bien, on peut l’espérer, par arriver jusqu’au cerveau de leurs électeurs : leur remarquable capacité à se tirer des balles dans le pied et, selon une loi balistique oblique mais vérifiée, dans le dos de leur peuple. Quelques exemples.

En Italie, Matteo Salvini, matamore triomphant il y a encore quelques jours, champion de la rhétorique xénophobe, veut provoquer des élections qui lui permettraient de consacrer dans les urnes sa percée fulgurante dans les sondages. Du coup, les autres partis se ressaisissent. Nécessité faisant loi, voyant que la politique de la Ligue handicape l’économie de la péninsule, que les réquisitoires contre l’Europe tournent à vide, que l’indifférence du gouvernement italien envers les noyades de migrants dans la Méditerranée finit par entacher l’honneur même d’un pays qui a accueilli un nombre considérable de réfugiés, les anciens ennemis du Parti démocrate et de Cinq Etoiles se rabibochent et menacent de se coaliser. Dans ce cas, Salvini se retrouverait hors les murs pour quelques années alors qu’il pensait toucher au but, tandis que d’autres essaieront tant bien que mal de redresser une économie en déroute.

Donald Trump, après avoir déclaré une guerre mondiale du commerce, se rend compte qu’il a peut-être déclenché au passage une récession planétaire. Auquel cas son argument principal de campagne, la bonne santé de l’économie américaine, risque de tomber à l’eau. Par la même occasion, la relative prospérité des ouvriers yankees qu’il est censé défendre pourrait se faner comme une mèche blonde sans teinture.

Boris Johnson, jouant son va-tout sur le «hard Brexit», découvre que les négociations avec l’Europe toujours unie sont plus ardues qu’il ne le pensait. Du coup, la sortie de l’Union sans accord pourrait bien se retourner contre la Grande-Bretagne, qui court le risque d’un chaos aux frontières, d’une paralysie économique et d’un éclatement du royaume. A terme, les Britanniques, peuple résilient, surmonteront à coup sûr l’épreuve. Ce sera au prix d’une libéralisation brutale de l’économie et d’une ouverture encore plus grande à la mondialisation, vieux projet de Johnson et des conservateurs les plus radicaux. Mais perspective qui se situe à l’opposé exact des espoirs des électeurs brexiters, qui voulaient quitter l’Union pour se protéger des tempêtes du grand large et qui se retrouveront encore plus exposés aux vents mauvais de la désindustrialisation et de la concurrence salariale des pays émergents. Ainsi agissent les démagogues : ils s’intitulent hérauts du peuple et ne font que son malheur.

Laurent Joffrin

 



28/08/2019
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